Hambourg mon amour

7 Sep

« Wer in der Zukunft lesen will, muss in der Vergangenheit blättern. »

(André Malraux…)

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Produits : van et utilitaire

Lieu : Hambourg (Germanie)

Trajet : Marseille-Lyon-Hambourg-Lyon-Marseille

Date : septembre 2010

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Ca y est, les vacances sont finies, les essais automobiles reprennent et le premier portique d’aéroport sous lequel je suis passé a sonné. Génial, ça me manquait… Première fouille au corps de la saison 2010-2011, whoopi-hoo !

Grande nouveauté aussi dans le pré-acheminement : après avoir transité et retransité par Orly et Roissy, j’ai expérimenté l’escale à l’aéroport de Lyon. Je ne peux malheureusement pas en dire grand-chose parce que les portes de débarquement et d’embarquement étaient juste à côté. Je n’ai pas eu l’occasion (ni le temps ni l’envie) de visiter l’aéroport. Je soulignerai seulement que trois urinoirs et deux WC pour toute une salle d’embarquement, c’est un peu mesquin.

Bref, je ne vais pas me lancer dans les critiques des toilettes d’aéroports, j’en ai déjà suffisamment avec les restaurants et les hôtels. Le propos de cette semaine portera sur la visite de Hambourg.

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Trivia question : comment s’appellent les habitants de Hambourg ?

Réponse de notre guide : les Hamburgers [prononcez An-bourre-gueure]. Véridique. En même temps, vous vous attendiez à quoi ?

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Nous sommes arrivés à l’hôtel le soir, les essais étant prévus pour le lendemain. Cette fois-ci, pour que les informations de ce blog soient les plus précises possibles, j’ai bien regardé : l’hôtel avait cinq étoiles. Je sais que vous tenez à ce genre de détails…

La conférence de presse et le diner avaient lieu dans la zone franche sur le port de Hambourg, à un kilomètre de là. Nous avions le choix entre y aller à pieds ou suivre la guide touristique germanophone blonde. Je crois que tout le monde (même les plus « expérimentés » de mes confrères) voulait se dégourdir les jambes après l’avion. Et puis il faisait bon dehors. Et puis mince quoi, le Journaliste est curieux, arrêtez de croire qu’il n’aime que manger et conduire, je ne sais pas d’où vous viennent ces idées.

Alors devinez quoi… J’ai pris mon appareil photo exprès pour vous !

Arrière de l'hôtel de ville

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Donc ça, c’est l’hôtel de ville. Une bombe anglaise est tombée juste devant pendant la deuxième Guerre Mondiale mais elle n’a pas explosé. Le bâtiment n’a subi aucun dommage pendant la guerre. Il est tellement large que je n’ai pas pu prendre assez de recul pour tout faire rentrer sur l’écran de l’appareil. Du coup, vous n’avez que quelques détails. Estimez-vous déjà heureux que j’aie joué au touriste de base au milieu de mes collègues, au risque de griller ma réputation de grand reporter international. Ahem.

Eh ben ça c'est le devant...

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Beaucoup de monuments hambourgeois (hamburgers ? Hambourgerois ?) sont construits en briquettes rouges, depuis l’église baroque jusqu’aux innombrables entrepôts de la zone franche, ce qui m’a fait dire que le revendeur de briques du coin a dû faire fortune sur plusieurs générations. C’est fou comme je peux être terre-à-terre parfois.

J'ai noté sur mon calepin : église Saint Pierre. J'espère que vous appréciez ma conscience professionnelle.

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A l’entrée de la zone franche, juste après le pont qui enjambe un cours d’eau, il y a un poste de douane désaffecté, seulement occupé par un mannequin moustachu et blême portant un uniforme vert. J’espère pour lui que l’original ne ressemblait pas à ça. Aujourd’hui, tout ce qu’il reste de la douane, c’est le Musée de la Douane« Que peuvent-ils bien exposer dans un musée comme celui-ci ? » me demanderez-vous (parce que vous ne cessez de me demander des trucs, c’est une véritable manie chez vous). Je me suis posé la question aussi. Je suppose qu’ils entassent les marchandises confisquées lors des fouilles de véhicules : haschich péruvien importé de Catalogne, contrefaçons chinoises de saucisses de Francfort, etc..

On va avancer jusqu’à la conférence de presse parce que si je vous décris les entrepôts un par un, on ne s’en sortira jamais.

Il y avait un rendez-vous de Montgolfières. Là vous voyez, c'est un... Chariot élévateur volant... Les germanophones ont décidément une imagination débridée.

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Tenez, pour cette fois je vais vous décrire le déroulement d’une conférence de presse. Déjà, les acteurs :

– directeur de la communication

– directeur des ventes

– directeur du marketing

– directeur de bureau d’études

– ingénieur chef de projet

– designers en chef

Il n’y a pas toujours tout le monde. Les designers, c’est assez rare, surtout depuis la présentation d’une grosse berline française (que je ne citerai pas) où une bande de journalistes a encerclé un pauvre designer lors du diner pour critiquer son travail. Il faut dire qu’elle était sacrément vilaine, cette voiture…

Mes préférés, ce sont les ingénieurs, principalement ceux qui présentent des diagrammes, des schémas et des éclatés en couleurs. Ils pensent qu’une flopée de mots compliqués pourra cacher le manque d’innovation technique d’un véhicule.  Ils sont persuadés qu’en nous en mettant plein la vue, personne n’osera poser de questions. Dommage qu’ils soient tombés sur le plus teigneux des journalistes.

Questions véridiques posées en conférence de presse :

« J’aimerais revenir sur le schéma que vous avez présentés sur la diapo 36. Oui voilà, celui-ci. C’est un schéma classique de mécanique vibratoire mais je ne comprends pas le lien avec le diagramme suivant qui lie la vitesse de compression des amortisseurs à la force résistante. Vous pourriez tout réexpliquer depuis le début ? »

« Vous avez dit que le pneumatique contenait des polymères. J’aimerais connaitre le monomère de base constituant les chaines polymériques macromoléculaires. »

Je promets que j’ai osé.

Morales de l’histoire :

– messieurs les ingénieurs, si vous présentez quelque chose, adaptez-vous à votre public. Il n’y a rien de plus désagréable (pas seulement pour un journaliste) que d’avoir l’impression de se faire enfumer. Soyez capables d’expliquer ce que vous présentez à quelqu’un qui n’a pas un bac+5 en génie d’huile moteur. Le jour où vous tomberez sur un vicieux qui aura la même formation que vous, vous le regretterez ;

– si quelque chose n’est pas indispensable à la présentation, n’en parlez pas ;

– évitez de mélanger les notions de résistance, de module d’Young, de rigidité et de dureté, c’est très mal vu ;

– apprenez à faire des diapos lisibles. Tout ce que vous montrez doit pouvoir être lu. Sinon, à quoi ça sert d’avoir perdu son temps à le mettre sur le diaporama ? On ne vous a pas appris à en faire le moins possible dans votre école d’ingénieurs ?

Et bien sûr, tout ce que je viens de dire ne s’applique pas à la présentation faite à Hambourg pour la bonne raison qu’il n’y avait pas d’ingénieur. On nous a donc parlé du marché des utilitaires, des ventes et, très rapidement, d’une amélioration des suspensions. Moi, naïf, je demande des précisions techniques sur la nature des modifications. Réponse : « Oh eh bien il y a de nouveaux bras de suspensions. ». Fin. Merci.

Non mais sérieusement ! Vous avez fait quoi dans votre bureau d’études pendant des années ? Je ne sais pas moi, détaillez le tarage, le diamètre des têtes de piston, les bagues d’ancrage, n’importe quoi mais ne me laissez pas sur l’idée que vous n’avez rien fait !

On se calme. On respire. Je ne voudrais pas que vous croyiez que je suis vindicatif, quelle que soit la signification de ce mot.

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Bon, on va arrêter de s’acharner sur les représentants des marques pour détailler les grandes étapes de la conférence de presse :

– vidéo introductive montrant des gens heureux qui conduisent la voiture

– carte postale de la région : localisation, histoire, personnages célèbres nés dans les environs, …

– marché actuel, perspectives de ventes

– présentation du véhicule : esthétique, motorisations, transmissions, placement par rapport à la concurrence, niveaux de finition et, rarement, prix

– explications sur le parcours d’essai et heures de rendez-vous pour le petit-déjeuner

– séance de questions/réponses.

Il est important de noter que, selon les constructeurs et les modèles, certains détails sont omis. Pour les berlines germaniques, on évite souvent de parler des prix ou des consommations pour se concentrer sur les innovations technologiques tandis que leurs copains tchèques ne se privent pas d’annoncer 10 000 € de moins pour quasiment le même produit. Des fois on ne compare pas son produit à la concurrence. Des fois on sélectionne les concurrents à qui se comparer. La constante, c’est la beauté de la voiture. Tous les constructeurs font la plus belle du monde. Pour l’anecdote, je citerai seulement la marque qui présentait un jour un « break aux allures de coupé ». Sans commentaire.

Lors de cette conférence hambourgeoise, la palme revenait au germanophone directeur de je-ne-sais-plus-quoi qui nous a annoncé fièrement : « Nous sommes des gens du Sud ! ». Il voulait dire « du sud de l’Allemagne ». Il ne s’est pas arrêté là : « La région de Hambourg est l’équivalent de la Toscane ou de la Provence. ». Ben voyons. Par la suite, un de mes collègues soulignait : « Ca doit faire longtemps qu’il n’est pas venu en Provence, celui-là. ». J’ai failli ajouter une remarque sur la diminution significative des colonies de vacances allemandes en France depuis les années 40 mais je me suis rappelé que les germanophones n’étaient pas réputés pour leur humour.

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Au diner, j’ai eu la présence d’esprit d’emporter le menu avec moi, histoire de ne pas avoir à retenir cette interminable liste de plats (d’autant que c’était tout écrit en barbare) :

Miam miam

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Cet article est déjà tellement long que je vais peut-être vous épargner les détails de l’essai en lui-même. Dommage parce que finalement Hambourg est une ville plutôt jolie. Le port de commerce est aussi moche que tous les autres dans le monde mais il est entouré de verdure. Ce n’est pas à Fos-sur-Mer que vous verrez ça….

Je vais conclure par la chambre d’hôtel. J’ai pris des photos ! Je rappelle que c’est du cinq étoiles. Deux interrupteurs rien que pour les éclairages de la salle de bain. Une lumière violette qui tombe sur le lit. Une fresque florale sur le mur de la salle de bain, juste à côté de la cuvette des toilettes. Normal.

Chambre de jour avant l'arrivée du Journaliste

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Chambre, le soir, juste avant que le Journaliste s'installe.

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Chambre après le passage du Journaliste.

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On est dans quel pays, là ?

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Notez qu'il faut avoir le bras long pour attraper le papier toilette.

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Les Simpsons en germanique, c'est franchement bizarre, pour ne pas dire terrorisant.

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Ah mais mince, j’ai fait tellement de photos que maintenant je n’ai plus assez de texte pour mettre entre.

Oh et puis je ne peux pas passer à côté de l’essai, ce serait criminel. En plus ça va vous faire rire de m’imaginer au volant de camionnettes. Pour une fois que ce n’est pas une super-sportive, vous êtes moins jaloux, hein ? J’avais donc le choix entre : le van, l’utilitaire et le camping-car. Comme je n’avais été dépêché que pour le premier, j’ai préféré essayer plusieurs motorisations du van plutôt que de m’amuser avec un machin trop haut que j’aurais invariablement coincé sous un tunnel. Mais même parmi les vans, j’avais encore le choix entre le compact, le long et l’extra-long. Vous imaginez le Journaliste, dégourdi comme un pied de chaise, au volant d’un corbillard de plus de cinq mètres ? Ben moi non ! Je me suis contenté du compact et du long, c’était déjà bien assez hasardeux entre mes mains. Ensuite il a encore fallu choisir entre l’essence et les diesel. Puis entre les boites manuelle et automatique. Puis entre les cylindrées. Puis entre les niveaux de finitions. Je crois qu’il y avait vingt-cinq véhicules en tout. On dit que la liberté est dans le choix. Je doute.

– « Vous voulez conduire quoi ?

– Heeeeuuuuuuu… »

Am stram gram… Allez, c’est parti pour le 2,0 L diesel boite manuelle, suivi par le 2,2 L boite auto. Le parcours était censé durer une heure mais entre les arrêts photos et les feux rouges (extraordinairement nombreux), il valait mieux compter trois quart d’heure de plus. Enfin ça, je l’ai découvert a priori.

Le point de départ des essais se trouvait là, ainsi que le restaurant pour le déjeuner.

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Il y a autre chose dont je voudrais faire part aux organisateurs des essais. Sur cette présentation, ils avaient eu la très bonne idée de lester les utilitaires de 650 kg. C’est pertinent puisque ça permet d’essayer le véhicule dans ses conditions de fonctionnement « normal » du point de vue de l’utilisateur final. Mais dans mon van, je n’avais aucun passager, pas même des poupées gonflables. Pour y remédier, je propose une solution fort simple qui ne nécessite aucun apport de ressources supplémentaires : remplir les vans avec les directeurs de la communication et des ventes, les ingénieurs et les chefs de projet. Ca a plusieurs avantages. D’abord ça me fait des gens avec qui discuter. Les journalistes présents étaient presque tous des spécialistes de ce genre de véhicules donc je ne connaissais personne et je me suis retrouvé tout seul à conduire ma camionnette (il y en avait tellement que ça n’a pas posé de problème). Deuxièmement, ça me permet de poser des questions en direct live aux gens qui ont conçu la voiture. « Mais à quoi vous pensiez en mettant les boutons de la radio derrière le levier de vitesses ? Ca vous a traversé l’esprit que j’aurais peut-être envie d’orienter l’aération ailleurs que sur ma figure ? » Enfin, le cas échéant, ça me permet de les terroriser en organisant mes propres courses de dragsters sauvages à chaque feu rouge hambourgeois.

Par ailleurs, certains constructeurs automobiles s’encombrent d’une horde d’hôtesses dont je remets parfois en doute l’utilité sur les présentations (malgré leurs qualités décoratives). Pourquoi ne pas les réquisitionner pour lester les véhicules ? Si j’avais eu sept jeunes femmes dans le van avec moi, il est certain que je me serais fait une autre opinion du véhicule.

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Ca me rappelle une strip de Joe Bar Team :

– « C’est sympa de m’avoir emmenée avec toi, Jérémie ! C’est génial par ici ! D’autant que sur des petites routes comme ça, tu serais plus à l’aise sans passager !

– Ben non justement, en fait tout seul ça passe moins vite à cause du mauvais revêtement. Grâce à ton poids en plus, on tient mieux le pavé. Ca marche bien aussi avec un gros sac de sable mais toi au moins tu n’esquintes pas la peinture du dosseret.

– TU ME LAISSES DESCENDRE ! »

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Après les essais des diesel, je suis revenu au point de départ pour casser la croûte avant de passer à l’essence. Devinez ce que j’ai mangé… Un hamburger, bravo.

Maintenant, ceux qui se sont moqués du Journaliste au volant de sa fourgonnette vont le regretter. Le dernier van que j’ai testé avait un V6 de 258 ch qui déposait les berlines germaniques à chaque démarrage. Contrairement à tout ce que vous pourriez penser, je n’ai pas accroché de cycliste ou de réverbère en sous-estimant les dimensions de mon van dans un virage. Pas une raie, pas un mort, rien. Je suis rentré cinq minutes avant le départ de la navette vers l’aéroport.

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Cette fois on va conclure pour de bon. Je vous balance les photos qui me restent et ensuite on arrête là parce que j’ai un article à écrire derrière ça.

Je vous ai montré la vue depuis la fenêtre de ma chambre (5ème étage) ? Non ? Ah ben c’est parti :

Ah, le ciel germanique, son bleu d'azur qui surplombe des monuments engageants et colorés !

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Et vous savez ce que c’est, ce monument ? Non ? Pas d’inquiétude, j’ai pris un prospectus pour vous cultiver :

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C’est bon, vous avez tout compris ?

Je terminerai avec une petite devinette. Dans le hall de l’hôtel, il y avait des peintures à vendre en exposition. A vous de deviner le prix de celle-ci :

Kreus, 120x120 cm

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Réponse : 1500 €.

Chapeau l’autiste.

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Ah si seulement j’avais écouté ma mère, je serais devenu ingénieur dans un bureau d’étude et je n’aurais pas tant d’histoires !

Une Réponse to “Hambourg mon amour”

  1. FE 19 novembre 2010 à 16 h 20 min #

    C’est touours un plaisir de te lire Reno ! Un glorieux mélange de jalousie et d’amusement !
    Au risque de me faire huer, je ferai quand même une remarque : les photos c’est chouette mais ça rend la lecture difficile au bureau. Je ne suis pas assez large pour cacher mon écran à mes collègues moi !

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